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dimanche 20 décembre 2009

Pic au Vent, premier quartier de maisons passives en Belgique


Quentin Wilbaux et Eric Marchal* ne boudent pas leur plaisir. Il y a douze ans, ils avaient eu l'occasion d'acheter ce terrain destiné au lotissement: 1,8 ha à 1,5 km du centre de Tournai. Sans bien savoir ce qu'ils en feraient exactement, ils s'étaient lancé dans l'aventure en se donnant comme défi de construire écologique et économique. Une sorte d'engagement fondamental. Le temps a passé. La maturation a été longue, qui a vu se succéder les idées et les concepts, jusqu'au jour du déclic.

Quentin: « Sans aucun pression ni délai, nous étudiions et esquissions des projets. Toutes les formes d'énergies renouvelables à l'échelle d'un quartier nous attiraient... sans jamais nous satisfaire entièrement. Puis, les choses se sont clarifiées. "Si l'objectif est de populariser l'habitat écologique, il nous faudra aller à l'essentiel: densité et mitoyenneté d'une part et isolation maximale d'autre part". Seul élément de technologie verte que nous avons alors retenu: les capteurs thermiques pour l'eau chaude sanitaire, gérée collectivement. Dès que cela a été clair, le processus s'est accéléré. Les plans devenaient simples; le permis a été délivré relativement rapidement. Nous avons travaillé avec une jeune entreprise de construction, la Compagnie du Bois, très volontaire et dynamique. J'ai été surpris par les possibilités qu'offre aujourd'hui le bois. La coupe est devenue tellement précise et modulable qu'on peut désormais facilement se passer du béton. Le chantier a débuté il y a deux ans et depuis l'été 2009, les 20 premières maisons sont « hors d'eau ». Une deuxième phase (16 autres maisons) est prévue plus tard ».

Ce mercredi 16 décembre, les deux promoteurs-architectes me font visiter les lieux avec fierté; les corps de métiers s'activent pour finir les intérieurs; les premiers occupants s'apprêtent à emménager. Tous semblent partager l'enthousiasme de mes hôtes.

Ils savourent. Leur rêve urbanistique, social et architectural a pris forme.

« Notre intention était démonstrative, voire politique », précise Eric. « Il est possible de construire du passif au coût du clef sur porte classique, à savoir 1250 euros/m2 tout compris. Ici, ce n'est pas un projet d'habitat collectif comme on en voit émerger de temps en temps. Nous étions les promoteurs, certes écologiques et sociaux mais promoteurs quand même, ce qui donne une grande liberté de décision. Notre seule contrainte était notre engagement de départ. C'est parce que nous étions seuls à bord que nous avons pu atteindre nos objectifs initiaux. Ceci dit, depuis que nous avons commencé la commercialisation (les 18 maisons mises en vente ont trouvé acquéreur ndlr), nous constatons qu'une certaine communauté se forme: les futurs habitants, en venant s'installer ici, partagent clairement les mêmes valeurs. En ce sens, le quartier deviendra habitat collectif, mais au rythme et dans la mesure où les habitants le voudront et au départ d'une structure qui garantit à chacun une sphère privée, tant intérieur qu'extérieur ».

Les maisons de la première phase forment ensemble un L ouvert sur le Sud. Au centre se trouve un grand espace vert, aire de jeu et de détente. Les jardins-terrasses privés et une rangé d'abris-carport séparent les maisons de la rue. Un bâtiment commun, comme on en trouve dans les quartiers en Scandinavie notamment, devrait être construit dans la deuxième phase.

Quentin: « Ce qui nous a frappé et nous plaît, c'est la diversité générationnelle de l'ensemble. Toutes les tranches d'âges sont représentées, du tout jeune couple aux grands parents. Et tous voient la copropriété comme un atout, une opportunité et une liberté ».

Eric conclut en attirant à nouveau mon attention sur la démonstration: « Nous voulons que les politiques viennent ici. Ils sont les bienvenus: les chiffres et les plans sont à leur disposition. Du logement passif public à un prix social, c'est possible ».

Données, plans et photos sur:

www.36-8.be

* Quentin Wilbaux et Eric Marchal avaient participé, au printemps 2007, à un voyage ARICIA dans le Vorarlberg "Architecture durable et contemporaine", organisé pour une délégation de mandataires locaux du Département français de la Manche.